

Le vent fait frissonner les feuilles de palmiers, manguiers, cocotiers, caresse nos visages, nous chuchote des histoires, rafraîchit nos corps. Quleques singes rentrent dans les fourrés, à peine effrayés par notre passage silencieux.
C’est une douceur de contraste que de rouler avec les mecs musulmans, leur kofia posé sur la tête, aussi délicatement qu’ un vélo posé sur le globe. Plaisir de tenter la discussion, plaisir de la bicyclette ouverte, vulnérable.
Soudain, l’air léger est déchiré par le bruit d’un klaxon. Rapidement fouettée par un bolide, elle rentre en turbulence. C’est la révolution dans l’air. Bruit effrayant, masse menaçante, présence pressante. La petite fille sur le bas côté a maintenant les cheveux hérissés sur la tête. Ce n’est pas un dessin animé, une farce mais une réalité. Les cyclistes sont heureux d’être encore debout, d’avoir survécu à l’incident. Gros décalage de temps, de vitesse. Foncer pour qui? Pourquoi? Ah oui! C’est vrai! Quelqu’un nous a dit en France qu’on pouvait tout voir avec une voiture… il suffit de savoir s’arrêter…
Nous, on ne les voit pas souvent à l’arrêt sauf ceux qui prennent le temps de nous prendre en photo. Nous sommes prêts, après beaucoup d’effort à tolérer sur la route ces bolides, mais à condition qu’ils ne dépassent pas les 90 km/heure, qu’ils respectent les distances de sécurité entre leur véhicule et nos vélos, et qu’ils nous disent bonjour! Alors, on attend, on essaie de rester peace mais, on veut pas finir ecrabouillés comme toutes ces bestioles à plumes ou à poils que l’on voit écrasées, au moins une par jour. Alors, parfois, souvent, on est obligé de traiter, traiter encore et encore, s’égosiller, perdre la voix, faire encore plus de bruit, ça fait du bien, mais c’est pas chouette pour nos mômes! Pas très peace!
Un phacochère s’offre un rafraîchissement dans la boue juste à côté de notre chemin. Mavuji, 60 kilomètres, un record pour Eusebio. Avec des pentes dans les deux sens, le moral reprend. Les gens changent, plus de proximité, plus d’expression, moins de réserve, on aime! Au nord de Dar la délicatesse nous a plu un moment, mais trop doux, ils en deviennent presque froid et moins humains. Le soir, les bivouacs se font souvent du bout des doigts, peu d’invitation, juste une école, et même devant, dehors comme aujourd’hui. Notre soleil est peut être un peu voilé, nos esprits se tournent maintenant vers le passé. D’abord le périple, les bons souvenirs de Tunisie, les folies d’Égypte, les douceurs du Soudan, les saveurs, les émotions d’ Éthiopie et la dévotion des Kenyans. Parfois même, certains s’envolent jusqu’en France: les jouets, le chocolat, le beurre… pleins d’artifices. Le soir, Marie Jeanne enfume le village; est-ce la raison de la distance qui nous sépare encore d’eux?

De nombreux baobabs, massifs, géants, si peu feuillus, jalonnent les campagnes voisines. on dirait des morts vivants, des forêts petrifiées, des automnes en plein été.


Une échelle improvisée reste plantée en permanence pour cueillir le fruit du baobab, si haut perché.


La belle fleur du baobab, chaque arbre a son temps de floraison indépendant d’une saison qui pourrait exister, rythmer.



Et voilà le poussin qu’il attend depuis l’Égypte… en mémoire de poulette coquette… on le troque contre un châle trop lourd.

Depuis Dar, nous savons que Lindi serait une étape reposante, et nous l’attendions avec impatience, côte après côte, Dave, un cycliste de Dar, connaissance d’Alan, nous avait indiqué les portes de sa propriété. Il n’est pas là mais les quelques gardiens qui arpentent la place, nous accueillent avec plaisir. Merci à tous.

Ecole, bain d’océan, soin des papilles, maintenance des vélos et repos. Comme à la maison!

Et momo, alias Jao, ne cesse de répéter : ” ma maison, elle est en Tanzania”…à Dar es salaam et maintenant à Lindi: il apprend la géographie.

Red dragon fish échoué sur la laisse de mer, attention danger!

C’est samedi et comme par providence, Andreas, Donia, et leur 2 garçons, une famille d’allemands sont venus faire un repas trapeur sur la plage. Fritures aux mille saveurs et pains sur bâtons. Nous sommes friands, depuis le temps que nous galerons à faire cuire notre grosse miche de pain, en voilà une bonne manière. A nous d’essayer! Et nous n’arrêtons pas.
Il y a des rencontres qui ne sont pas là par hasard. De nos aventures aux leurs, très vite, Dieu surgit, guide leurs pas, les nôtres. Nous avons des chemins parralèles. Chacun a quitté un monde matériel pour une spiritualité ou un bonheur plus simple.


Eusebio a façonné une légende en pédalant au bord de l’océan:” les mers ont été crées par des géants qui ont creusé leurs assiettes. Ils ont salé leur plat, puis les rivières l’ont rempli”

Hansel croque le pain, croque la vie, ici ou ailleurs.

En ville, à Dar, Dieu avait disparu! Le voilà qui resurgit avec Andreas et Donia
Depuis quelques années , nous flirtons avec l’incroyance. Elle nous a permis d’être plus adulte dans notre foi, de prendre en compte des questions dont les réponses paraissent aller de soi et qui, en réalité, ne sont pas évidentes. C’est en cela que l’incroyance est une chance pour le croyant. Il y a derrière certains refus de Dieu une haute idée de Dieu. “Ce sont souvent les athées et les agnostiques qui, les premiers, ont dénoncé les compromissions de l’Église, crié au scandale, comme s’ils sentaient confusément, parfois beaucoup mieux que les communautés chrétiennes et que les responsables d’Eglises, qu’il en allait de l’honneur de Dieu et que c’était une imposture de le mêler à ces combats douteux. Ils défendaient ainsi, sans s’en douter, la réputation de Dieu.”

Après Jésus en Egypte, rappelez vous du mystère des pyramides mathématiques, de la communauté des zabaleen dans les montagnes mokatan, (www.cavechurch.com), la foi vivante de tous les musulmans arabes dans leur hospitalité débordante, de la Tunisie au Soudan, des surprises mystiques des orthodoxes éthiopiens, ceux qui nous ont parfois accueilli comme si nous étions des anges… Nous continuons notre périple, contre vent et marées, malgré le découragement inévitable de certains jours: pèlerinage personnel, spirituel, humanité collective. Nos états successifs: éveil, ascèse, illumination, et parfois nirvana déconstruisent et reconstruisent. La plupart nous demande “pourquoi?” Se la pose t-il eux même? attendons nous le miracle? un chagrin à oublier ?un défi à relever? Et pourquoi faudrait il une réponse, un but précis? Aucune réponse ne satisfera leur pourquoi, pourquoi? La meilleure réponse qu’on ait trouvé jusque là, c’est pourquoi pas…

Donia fait pousser puis sécher de l’artémise, pour les tisanes familiales contre la malaria
Démarche spirituelle personnellle ou collective, ils ne sont pas très attachés à l’église, la communion.
Andreas diffuse dans les écoles locales un petit film sur la vie de Jesus, c’est sa manière à lui de prêcher.

Nos enfants se captivent pour la version en francais. La religion est tellement présente sur la route, ils font le plein de questions pour la suite du voyage. Espérons que l’équilibre du vélo, le mouvement soit essence de réponses.


Les anniversaires sont toujours un peu à la bourre, car difficile de trouver des cadeaux et les ingrédients pour faire un bon gâteau.
Pour le tour d’Hansel, c’est l’heure du grand jeu de piste, chasse au trésor,avec une carte: le pétrifié, le colosse de la baie, l’arbre à crottes, l’arbre à secret, l’errance…
Quelques extraits de rébus:
Mon 1er pose la question du sujet, mon 2eme sert à dormir, mon 3eme est une plante avec laquelle on fait des bonbons, mon 4eme est le mari de l’oie, mon 5eme se boit, mon tout est le plus sommet du continent…
Mon 1er est la sixieme note de musique de la gamme, mon 2eme est la première personne du pluriel, mon 3eme est la lettre v, mon 4eme sert à voler, mon 5eme est orné de pétales, mon tout est une capitale africaine.

Et voilà la tarte à la banane et papaye, avec pâte brisée, sur lit de crème, pâtissière s’il vous plaît!

Et dès l’aube, à 6 heures, momo réclame: “donne moi quelque chose à manger! Il faut vite faire la pâte pour le pain ou les chapatis.

Au pied du baobab, les villageois d’un soir nous ont offert du bois pour le feu, et un seau d’eau, comme à Mada. Une centaine d’habitants, c’est la taille idéal pour que l’humanité reste humaine.

Ils nous font même goûter des racines délicieuses.
A l’ombre des anacardiers, pour la pause de l’après midi, nous préparons les Noix de cajoux avec Martin du Mozambique. Un village plus loin, les riches collecteurs qui convoient des sacs de 25 kgs nous offrent à peine une rue ensablée pour planter la tente. Nous decampons devant cette imposture, cette pauvre hospitalité de riches…
60 kilomètres avant Mtwara, un véhicule tout terrain nous dépasse au ralenti puis s’arrête. Chris sort, nous tend son adresse à Mtwara. C’est le minimum que je puisse faire pour vous, vous accueiliir chez moi là bas. Ce que je vois est impressionnant, vous, vos enfants, votre équipage, cest magnifique, un rêve de môme.
Encore une petite perle sur notre route, un bel, oasis sur notre chemin.
Nous cuisinons ensemble, crevettes, crêpes, vin rouge et baignade. On papote sur le voyage, la simplicité, le vélo qu’il pratique également. Il est bluffé par notre tout petit budget, regonfle son moral sur la possibilité de le faire en se disant : “Si un gosse de 6 ans en est capable, pourquoi pas moi?” Nous sommes heureux de témoigner, de motiver, donner envie. C’est une raison suffisante du voyage.

Chris travaille Chez “Giz”, dans le même organisation allemande que Philip rencontré à Dar. Assainissement d’eau, et projet d’amélioration du quotidien, une sorte d’ONG.


Les petits singes adorent ôter la coque des Noix de cajou. Ils prelevent leur taxe à la source…au noir.

Kassahun, originaire d’Addis Abeba,travaille avec Chris. Ça fait chaud au coeur de retrouver un éthiopien, en plus exilé aux Usa, puis Liberia etc… longue discussion de nomades

Un père avec ses 3 enfants sur son vélo, le graal des transports collectifs.

Un fou de vélo tanzanien fait une dizaine kilomètres avec nous. Nous sommes invraisemblables pour lui, il est invraisemblable pour nous.

Ca roule des chapattis ici. La variété culinaire en Tanzanie reste un rêve de môme…

Il était temps de faire la pause…

Pause thé dans la soucoupe, une grande spécialité tanzanienne pour le refroidir.

Pause papaye, dégustation publique!